C’est une longue histoire d’amour entre l’opéra et le Théâtre du Jorat, depuis des lustres. Dans cet espace tout en bois, les voix trouvent des résonnances émouvantes et scintillantes, enrobées et portées par des notes enchanteresses ou frémissantes. Reprendre cette version de Nabucco, de Giuseppe Verdi (1813 – 1901), créée en novembre 2018 à la Cathédrale de Lausanne (voir photo), n’est pas anodin, ne serait-ce que parce que le décor principal est une immense spirale… en bois. Pour les personnages, les artistes, la grimper ressemble à un désir parfois orgueilleux d’élévation spirituelle et de libération, et la redescendre peut se confondre avec la prise de conscience d’un échec, d’une immersion incontrôlable dans les dédales d’une fuite dramatique.
Sous la houlette de l’expérimenté metteur en scène Gérard Demierre, associé au feu follet Jean-Philippe Guilois, l’ensemble vocal Horizons et l’orchestre Amabilis, entourés de solistes de haut vol, ont relevé un défi corsé. Ce sont des mois de travail pour mettre en lumière délicatement ce qui est d’ordinaire une imposante machinerie romantique digne de péplums pour grands espaces scéniques.
Il s’agit d’abord d’une histoire d’esclavage, celle d’un peuple pris sous le joug d’un tyran qui se prend pour un dieu. Et donc de deux peuples qui veulent s’égorger parce que leurs divinités sont différentes. Une guerre politique et religieuse dont les ramifications contemporaines sont évidentes. Babylone for ever. Il y a dans cette production un cumul de souhaits artistiques et pédagogiques, en lien direct avec le pouvoir mélodique et la profondeur psychologique des oeuvres de Verdi.