LE DROIT INTOUCHABLE A LA DIFFERENCE
Les plus anciens se souviendront peut-être d'un spectacle épique du Footsbarn Theatre sous chapiteau à Sauvabelin, au début des années 80, dans le cadre du Festival international de théâtre contemporain de Lausanne, lancé par Jacques Gardel. Ou d'un autre, pas moins spectaculaire, à l'enseigne de Mir Caravane, qui regroupait une dizaine de compagnies européennes, à l'affiche un peu plus tard d'une autre édition de ce même festival. Accueillir le Footsbarn au Jorat est un honneur. L'histoire de cette troupe est en même temps celle du théâtre en général.
Délaissant Shakespeare pour une fois, elle s'attaque à un texte qui, adapté au cinéma par Milos Forman, reste dans toutes les mémoires, grâce également à la partition hallucinante de Jack Nicholson : Vol au-dessus d'un nid de coucou. Un hôpital psychiatrique, des hommes enfermés, sans doute un peu fêlés, mais rêvant de liberté, et une infirmière chef tyrannique, pour ne pas dire sadique. Le drame se joue non sans humour, dignité et solidarité, comme une quête absolue d'indépendance, du droit à la différence, face au système, aux règles, à la grande machine de la société normative. La folie n'est pas toujours là où on l'imagine.
La part onirique du roman convient bien au Footsbarn Theatre, itinérant, inclassable et cosmopolite depuis quarante ans. Il se joue des codes théâtraux, réinvente en permanence, et propose des spectacles où la chair et l'esprit s'entremêlent avec profondeur et facéties. Il peut s'épanouir en salle, sous chapiteau ou dans la rue, jonglant avec les langues, multipliant les parades et les animations. Il est né dans une grange ( barn, en anglais ), celle de M. Foot, dans les Cornouailles. Bienvenue dans la Grange sublime !