« Cette histoire de pirates, raconte Heidi Kipfer, a commencé à Amsterdam, il y a trois ans, au Musée de la marine. Je visitais un vieux navire, une frégate, et cela m’a transportée dans un lointain passé, celui de L’Île aux trésors, de Robinson Crusoé, du Chant de l’équipage, ces livres que j’ai dévorés dans mon adolescence. Tout y était. Cela respirait des histoires d’abordage, de sang, de rhum et de fêtes. En rentrant en Suisse, j’ai lu L’Histoire générale des plus fameux pirates, de Daniel Defoe, et c’est là que j’ai pris connaissance de l’histoire du Capitaine Misson, du prêtre Carracioli et de Libertalia. D’autres livres ont nourri ce projet : ceux de Marcus Rediker, mais surtout Les Pirates, de Gilles Lapouge. »
« Dans le langage courant actuel, poursuit la metteure en scène, utopique veut dire impossible ; une chimère. Paradoxalement, au début du XVIe siècle, les auteurs qui ont créé ce mot voulaient élargir et explorer le champ du possible ; en grec, le mot utopie signifie « qui ne se trouve en aucun lieu ».
Des rêveurs, il en reste encore aujourd’hui, s’enthousiasme Heidi Kipfer. Sur les planches, sur le pont, des comédiens, des musiciens et un circassien vont faire revivre en musique, en mots et en acrobatie « la fabuleuse histoire de la République de Libertalia, une aventure éphémère fondée par deux pirates à la fin du XVIIe siècle sur une côte lointaine de l’Océan Indien, sur l’île de Madagascar. Le creuset d’une nouvelle humanité définitivement débarrassée des rapports de domination. » On ne dévoilera pas ici la fin de ce rêve égalitaire et fraternel, de cette utopie sauvage et romantique. Peu importe que la République de Libertalia ait vraiment existé. L’essentiel est que cette braise porteuse d’espoir reflambe encore parfois.